Les réfugiés ukrainiens apportent une contribution précieuse au système national de santé polonais pendant leur séjour dans le pays.
En février 2022, des millions de réfugiés ont franchi la frontière terrestre occidentale pour se rendre en Pologne, ce qui constitue le plus grand mouvement de population depuis la Seconde Guerre mondiale. Plus d’un an plus tard, la Pologne continue de recevoir le plus grand contingent de réfugiés ukrainiens, avec 1,5 million de personnes bénéficiant d’une protection temporaire.
Bien que le gouvernement et les citoyens polonais aient chaleureusement accueilli leurs voisins, la situation engendre une pression considérable sur le système de soins de santé, notamment en termes d’effectifs, en raison de la demande accrue de services.
Bien que de nombreux professionnels de santé ukrainiens soient désireux d’apporter leur soutien, ils se heurtent à des obstacles importants, tels que le manque de compétences linguistiques en polonais et les différentes qualifications requises pour exercer dans le système de santé polonais. L’OMS collabore par conséquent étroitement avec le ministère polonais de la Santé afin de délivrer un soutien et des conseils, et de permettre ainsi aux agents de santé ukrainiens qualifiés de faire profiter le système de santé national de leurs compétences et de leur formation.
Le docteur Olha Kompaniiets est spécialiste des maladies rénales et exerçait à l’Institut du rein de Kiev avant la crise en Ukraine. Elle vivait là-bas avec son mari, égalemet médecin, ainsi que son fils de 17 ans. Au début de la guerre, son mari est immédiatement enrôlé dans l’armée pour servir comme chirurgien de campagne. Avec sa fille de 23 ans, qui vit déjà à Cracovie, et son fils, elle décide d’embarquer dans un train d’évacuation le 1er mars 2022.
Le voyage fut particulièrement pénible. Lorsque le docteur Kompaniiets est arrivée en Pologne, bien qu’elle soit physiquement en sécurité, elle a constaté que le stress du voyage, son inquiétude quant à la situation en Ukraine et la difficulté de s’adapter à sa nouvelle situation avaient affecté sa santé mentale.
Elle a demandé l’aide de professionnels de la santé mentale et du soutien psychosocial ainsi que de bénévoles à Cracovie, qui l’ont aidée à surmonter ce qu’elle a vécu et à adopter un nouveau mécanisme d’adaptation orienté vers l’épanouissement personnel.
Le programme de santé mentale et de soutien psychosocial a aidé le docteur Kompaniiets à faire face à sa nouvelle situation en la motivant à améliorer ses compétences linguistiques en polonais et à remplir les formalités administratives nécessaires pour exercer la médecine dans le pays. Elle a demandé le permis temporaire d’exercer proposé par l’État polonais aux professionnels de santé. Entre-temps, elle a commencé à étudier le polonais et a trouvé un emploi administratif dans une clinique de Limanowa, ce qui lui a permis d’apprendre la terminologie médicale.
Or, il peut être difficile pour les professionnels ayant obtenu leurs qualifications médicales en dehors de l’Union européenne (UE) de comprendre le processus de demande d’un permis temporaire d’exercer au sein du système de santé polonais et d’obtenir les documents nécessaires à cette fin. L’OMS coopère avec les autorités polonaises pour lancer une ligne d’assistance téléphonique destinée aux médecins, dentistes et infirmiers formés dans des pays non membres de l’UE, y compris l’Ukraine.
La ligne d’assistance téléphonique fournit des informations complètes sur l’obtention d’un permis temporaire d’exercer, et aide également les réfugiés ukrainiens à s’orienter dans le système de santé en leur délivrant des conseils précis sur la manière d’accéder aux traitements et aux médicaments en Pologne.
L’OMS a également œuvré avec le ministère de la Santé et le Centre d’enseignement postuniversitaire de Varsovie à l’élaboration d’un cours gratuit en ligne à l’intention des médecins et dentistes ukrainiens en vue de fournir des informations essentielles sur le système de santé national. Ce cours contribue dans une très large mesure à l’intégration réussie des professionnels de santé ukrainiens dans le système polonais. Le mécanisme s’est avéré efficace, et l’OMS élabore actuellement d’autres cours en ligne pour aider les professionnels de santé ukrainiens.
Le docteur Kompaniiets a été admise à la Chambre médicale régionale de Tarnów en novembre dernier. Depuis, elle exerce aux côtés de collègues polonais dans le Département de médecine interne et de néphrologie de l’Hôpital de voïvodie Saint-Luc. Son professionnalisme et son expérience ont impressionné la direction.
« Pour nous, le bien-être de nos patients passe avant tout. Nous ne pouvons pas faire de concessions sur la qualité des soins que nous dispensons. Si nous sommes ouverts dans notre approche du recrutement, la condition préalable est que le personnel connaisse non seulement sa spécialisation, mais aussi les procédures médicales polonaises et la langue. Le docteur Kompaniiets est une collaboratrice efficace », nous confie Mme Anna Czech, directrice de l’Hôpital Saint-Luc.
Le docteur Kompaniiets a su profiter de son sentiment d’utilité au travail. « Je suis très heureuse de pouvoir enfin exercer ma profession médicale après des mois d’attente. La vie en Pologne est très agréable. Les gens sont particulièrement gentils et ma coopération avec les médecins et le personnel polonais est exceptionnelle », explique-t-elle.
« Bien sûr, lorsque la guerre sera terminée, je veux rentrer chez moi, à Kiev. Une fois là-bas, j’aimerais accueillir toutes les personnes en Pologne qui nous ont aidés, ma famille et moi, pendant cette période difficile », ajoute le docteur Kompaniiets, visiblement émue.
Le docteur Paloma Cuchi, représentante de l’OMS en Pologne, évoque les avantages de ce projet : « les réfugiés bénéficiant d’une protection temporaire en Pologne ont besoin de travailler. En aidant les personnels de santé à exercer leur profession, on veille à ce qu’ils maintiennent leurs compétences et continuent à travailler dans le secteur de la santé. Les professionnels de santé ukrainiens et polonais peuvent bénéficier d’un échange de connaissances et de données d’expérience. »
Comme l’explique ensuite le docteur Cuchi, « nous avons également constaté que les réfugiés ukrainiens ayant des connaissances limitées en polonais se sentent beaucoup plus à l’aise en présence de professionnels de santé capables de communiquer dans leur langue. En aidant les médecins réfugiés à continuer à exercer, on permettra au système de santé ukrainien de bénéficier de leurs compétences et de leur expérience lors de la reconstruction de l’infrastructure nationale une fois ces derniers rentrés chez eux. »
Le rôle de l’OMS dans la réponse à la crise en Ukraine
L’OMS collabore avec les pouvoirs publics et les partenaires afin de dispenser des services de santé d’urgence, d’améliorer les services de santé locaux et d’inclure les réfugiés dans les systèmes et plans de santé nationaux.