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Comment les sages-femmes polonaises aident les Ukrainiennes ayant fui leur logis

4 mai 2022
Communiqué de presse
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Au milieu de leurs tâches quotidiennes, qui consistent à donner aux nouveau-nés l’accès à notre monde en toute sécurité, un groupe de sages-femmes polonaises recueillent des produits de première nécessité pour les Ukrainiennes qui arrivent seules à l’hôpital afin d’accoucher. « C’est un petit geste qui, nous l’espérons, peut amener un peu de soleil pour un moment », déclare Martyna Grygiel-Kaczmarek, sage-femme à l’hôpital Sainte-Sophie de Varsovie, la capitale polonaise. 

Cette année, à l’occasion de la Journée internationale des sages-femmes (5 mai), l’OMS/Europe braque les projecteurs sur les sages-femmes de toute l’Ukraine et des pays voisins, qui continuent à prodiguer des soins salvateurs aux mères fuyant la guerre. Depuis le siècle dernier et, en fait, tout au long de l’histoire, les sages-femmes ont été aux côtés des femmes dans ce moment de vulnérabilité qu’est l’accouchement, les aidant à mettre au monde de nouvelles vies. 

À l’hôpital Sainte-Sophie, Martyna aide les femmes à accoucher dans ce qu’elle qualifie de lieu idéal pour donner naissance. De plus en plus souvent, maintenant, à cause de la guerre en Ukraine, les sages-femmes d’ici ont commencé à s’occuper de mères ukrainiennes et de leurs nouveau-nés. 

En dehors de son travail au sein du service de sages-femmes, Martyna est également active dans une association locale de bénévoles, qui prépare et envoie des trousseaux de naissance aux femmes en Ukraine, qui doivent parfois accoucher dans un abri ou dans une cave. Ces trousseaux contiennent des instructions sur la manière d’aider une femme à accoucher, à l’intention de personnes sans expérience médicale.

Normaliser la naissance


Le centre médical « Żelazna » de l’hôpital Sainte-Sophie a ouvert ses portes en 2012 comme maternité dirigée par des sages-femmes au sein de l’hôpital. Ici, Martyna jouit d’un haut degré d’autonomie : « Dans le service de sages-femmes, je travaille de manière très indépendante », dit-elle. « J’aime travailler ici parce que je peux décider si la femme est en mesure d’accoucher dans notre unité. Je peux aussi la soutenir durant tout l’accouchement et m’occuper du nouveau-né. » 

Mais Martyna est bien consciente du fait que l’indépendance dont elle jouit dans la maternité dirigée par des sages-femmes est unique par rapport à beaucoup d’autres endroits de Pologne.

En Pologne, comme dans de nombreux pays du monde, l’encadrement de la naissance est devenu de plus en plus médicalisé, avec des taux relativement élevés d’interventions médicales et des taux bas d’accouchements vaginaux spontanés. Les soins prénatals sont presque exclusivement prodigués par des obstétriciens ou des gynécologues, ce qui peut être inutilement coûteux et ne permet pas toujours une prise en charge complète des femmes enceintes. La médicalisation excessive de la naissance est également associée à des taux d’interventions médicales qui ne se justifient peut-être pas.

Les collègues de Martyna, des sages-femmes qui travaillent ailleurs, ont vu des femmes enceintes aux prises avec des sentiments contradictoires parce qu’« elles n’ont pas pu prendre leurs propres décisions quant au processus d’accouchement », explique-t-elle. 

L’hôpital Sainte-Sophie a connu bien des succès dans le processus de « normalisation » de la naissance, qui garantit que les sages-femmes sont toujours à proximité des femmes enceintes, prêtes à les soutenir et à leur prodiguer des soins. « Parfois, c’est difficile pour les nouveaux médecins, peu familiarisés avec cette approche de la naissance, de comprendre pourquoi les sages-femmes sont tellement importantes dans cet hôpital », dit-elle. 

Malgré le soutien aux services de sages-femmes manifesté par les collègues médecins, la plupart des femmes font toujours plus confiance à un docteur qu’à une sage-femme durant leur grossesse et la naissance. « Nous avons encore fort à faire pour convaincre les femmes qu’une sage-femme bien formée et agréée est la personne qu’il leur faut pour les soutenir pendant la grossesse et l’accouchement », dit Martyna. 

Un endroit idéal pour accoucher


En Pologne, plusieurs lois et règlements ont été adoptés depuis 2011 pour permettre aux sages-femmes de dispenser en toute indépendance des soins avant, pendant et après la naissance. En 2020, le ministère de la Santé a fait de la consultation d’une sage-femme un service de soins primaires garanti, financé par le secteur public. 

Aujourd’hui, quelque 10 % des naissances à l’hôpital Sainte-Sophie ont lieu dans le service de sages-femmes. Les soins prodigués par les sages-femmes suivent les principes de l’accouchement naturel, sans apport supplémentaire d’ocytocine, et tiennent compte de la vitesse des contractions. 

« Bien entendu, la femme doit être en parfaite santé pour se trouver ici », explique Martyna. « Mais elle peut être ici avec son partenaire pour la soutenir, et la sage-femme sera là tout le temps, jusqu’à ce qu’elle accouche. C’est un endroit très paisible et calme – c’est en fait un endroit idéal pour accoucher. »