En l’espace d’une décennie, le Kazakhstan a abandonné son système d’information sanitaire sur papier et s’est lancé dans la mise en œuvre rapide d’interventions numériques pour les gestionnaires, les cliniciens et les patients. Les données et les processus numériques sont devenus essentiels pour le financement de la santé, le suivi des patients, le contrôle de la qualité et les services publics du secteur de la santé. Depuis 2013, année où a été adoptée la première stratégie nationale de développement de la cybersanté, le Kazakhstan a mis en œuvre des réformes institutionnelles et renforcé sa législation, tout en introduisant des outils numériques à tous les niveaux du système de soins de santé.
Avec le soutien financier de l’Union européenne (UE), le bureau de pays de l’OMS au Kazakhstan et le ministère de la Santé ont organisé une table ronde de 2 jours réunissant des personnalités du monde universitaire afin de répondre à certaines des questions soulevées par cette évolution. Les professionnels de santé sont-ils déjà en mesure de veiller à ce que les nouvelles technologies soient utilisées en toute sécurité ? Ce secteur dispose-t-il de suffisamment de ressources humaines et de connaissances pour suivre le rythme de l’évolution technologique ? De quelles aptitudes et connaissances numériques les professionnels de santé devraient-ils disposer d’ici 5 ou 10 ans ?
« Dans le secteur des soins de santé, il faut énormément de temps pour planifier la formation et la gestion des ressources humaines, alors que les technologies nous apportent chaque jour des révolutions. Cela signifie que nous devons aborder de manière stratégique et réfléchie le thème de la santé numérique dans la formation initiale », déclare M. Beibut Yessenbayev, vice-ministre de la Santé du Kazakhstan.
L’avenir sera numérique
Des doyens et des membres du corps enseignant de 7 universités de médecine, ainsi que des fonctionnaires du ministère de la Santé, étaient présents à cet événement. Les participants ont entamé des débats animés sur les connaissances et les compétences spécifiques qui devraient être intégrées dans les programmes d’enseignement de la médecine. Plusieurs thèmes clés ont été dégagés.
- Littératie numérique : les participants se sont accordés sur le fait que les professionnels de santé doivent posséder des bases solides en matière de littératie numérique, ce qui implique non seulement des compétences informatiques de base, mais aussi la maîtrise des questions de confidentialité des données et de cybersécurité.
- Télémédecine et suivi à distance : l’importance de la formation des professionnels de santé à la télémédecine et au suivi à distance des patients a été soulignée, vu la tendance croissante à dispenser des soins de santé par voie virtuelle.
- Intelligence artificielle (IA) et analyse de données : l’intégration de l’IA et de l’analyse des données dans les processus de prise de décision clinique a été jugée cruciale pour améliorer la précision des diagnostics et les résultats des traitements.
- Formation interdisciplinaire : bien que certaines universités de médecine aient déjà organisé des formations en collaboration avec des facultés techniques sur les technologies de l’information dans le secteur des soins de santé, on a souligné l’importance de favoriser la collaboration entre les professionnels de santé, les analystes de données, les ingénieurs et d’autres experts pour encourager l’innovation dans le secteur des soins de santé.
« Un développement rapide de la santé numérique au Kazakhstan rend nécessaire l’adoption d’une nouvelle approche transdisciplinaire pour former des professionnels ayant fait la synthèse entre des connaissances en médecine et en technologies de l’information. Pour mener à bien cette initiative, nous devons définir le rôle et la mission de ces spécialistes, établir des normes et des compétences professionnelles rigoureuses et entamer une collaboration étroite avec le ministère de la Santé, l’OMS et les employeurs. Nous sommes déterminés à tout mettre en œuvre pour promouvoir la santé numérique dans ce pays et favoriser son développement », déclare le professeur Victor Ricklefs, vice-recteur chargé du développement stratégique et de la coopération internationale à l’université de médecine de Karaganda.
Les participants ont convenu de plusieurs mesures qui serviront de point de départ à un développement durable des ressources humaines et des capacités dans le domaine de la santé numérique. L’OMS est résolue à soutenir le Kazakhstan dans ce domaine important, en jouant un rôle capital pour assurer un avenir meilleur où le numérique prendra plus de place, afin de seconder les professionnels de santé et les patients qu’ils servent. Cette tâche est en cohérence avec le « Plan d’action régional pour la santé numérique dans la Région européenne de l’OMS 2023-2030 », adopté l’année dernière par tous les États membres de la Région. Renforcer les capacités des pays pour régir la transformation numérique dans le secteur des soins de santé et promouvoir la littératie en santé numérique sont des objectifs clés de ce plan d’action.
Un partenariat avec l’UE
Ce débat s’inscrivait dans le cadre d’un projet de 10 millions d’euros, co-financé par l’UE et mis en œuvre par l’OMS/Europe en 2022-2026. Ce projet vise à amortir l’impact de la pandémie de COVID-19 et à renforcer durablement la résilience en matière de santé, grâce à une amélioration des programmes nationaux de vaccination et des systèmes de gestion de l’information sanitaire dans 5 pays d’Asie centrale : le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan.
Lancé en octobre 2022, il se concentrera, dans un premier temps, sur le renforcement de la vaccination contre la COVID-19, l’élaboration et la mise en œuvre de plans de vaccination systématique et de vaccination contre la COVID-19, la formation d’agents de santé et de professionnels chargés de la vaccination, et le renforcement des systèmes d’information sur la vaccination. Le projet permettra également un renforcement de la surveillance des maladies évitables par la vaccination et un recours accru aux solutions numériques pour prévenir les épidémies futures de maladies évitables par la vaccination et y réagir.