Un nouveau projet améliore les résultats pour les réfugiés ukrainiens en Pologne qui suivent un traitement contre la tuberculose.
Maryna, 27 ans, ne savait que trop bien que la tuberculose était une maladie grave. Travaillant en médecine légale à Dnipro (Ukraine), elle participait régulièrement à l’autopsie de patients infectés par la tuberculose. L’Ukraine est le deuxième pays le plus touché par la tuberculose dans la Région européenne de l’OMS, avec 73 cas pour 100 000 habitants.
Maryna s’est rendu compte qu’elle n’allait pas bien alors que l’Ukraine faisait l’objet d’un confinement COVID-19 strict, ce qui signifiait que l’obtention d’un diagnostic confirmé prenait plus de temps.
Après que des radiographies ont révélé la présence d’une quantité considérable de liquide dans ses poumons, elle a été hospitalisée, ce qui l’a séparée de sa fille qui venait d’entrer à l’école. Comme sa fille lui manquait, cela a renforcé sa détermination à terminer le traitement.
« J’ai dit à mon mari que, quoi qu’il arrive, je devais vivre pour notre fille, » a-t-elle expliqué. « Je devais redevenir forte et en bonne santé. »
De nouveaux médicaments disponibles
Maryna a commencé un traitement sans que sa santé ne s’améliore pour autant. Finalement, après plusieurs mois de traitement, on lui a diagnostiqué une tuberculose pharmacorésistante, une expression servant à définir une tuberculose résistante à au moins un médicament antituberculeux. La tuberculose multirésistante (MR) et la tuberculose ultrarésistante (UR) réagissent encore moins bien au traitement. La pharmacorésistance constitue un obstacle majeur à l’élimination de la tuberculose dans la Région, où se trouvent d’ailleurs 22 % des patients atteints de tuberculose-MR dans le monde. Ces dernières années, si des schémas thérapeutiques plus efficaces ont été introduits pour la tuberculose pharmacorésistante, les médicaments peuvent être très coûteux. En raison de sa forte incidence de tuberculose, l’Ukraine est l’un des pays où les nouveaux médicaments recommandés par l’OMS sont largement disponibles.
Maryna a été admise à l’hôpital de Poltava, où elle est restée 3 mois. Bien qu’elle parle à sa fille tous les jours, elles ont toutes deux trouvé la séparation physique très difficile.
Traitement assisté par vidéo
Heureusement, une fois que Maryna a commencé à prendre le bon traitement contre la tuberculose, sa santé s’est rapidement améliorée. Lorsque les tests ont montré qu’elle n’était plus contagieuse, elle a pu réintégrer le domicile familial à Dnipro et poursuivre son traitement en ambulatoire.
« J’étais ravie d’être enfin de nouveau avec ma fille, » nous a confié Maryna. « Lorsque je suis rentrée à la maison, je savais exactement ce que je devais faire pour me soigner comme patiente ambulatoire. J’avais avec moi l’équivalent d’un mois de médicaments. J’ai suivi un traitement quotidien assisté par vidéo au cours duquel j’ai pris mes médicaments en présence du médecin et discuté de tous les problèmes. J’ai soumis mes rapports au besoin, et je savais que je devais retourner à l’hôpital de Poltava chaque mois pour passer des tests et récupérer mes médicaments. »
Mais le 24 février 2022, la vie de Maryna a été bouleversée par l’escalade de la guerre. Elle s’est retrouvée dans l’impossibilité de se rendre à ses consultations à l’hôpital en raison des routes bloquées, des tirs de missiles et de l’interruption des transports publics.
Fuite en Pologne à cause de la guerre
Maryna a poursuivi son traitement ambulatoire avec les médicaments dont elle disposait, en informant régulièrement son médecin. Mais comme la situation se détériorait et que sa fille supportait difficilement les attaques de missiles, elle a pris la décision de fuir en Pologne, laissant son mari derrière elle. Elle n’a pu emporter que 2 mois de médicaments contre la tuberculose. En tant que professionnelle de santé, Maryna savait que l’interruption d’un traitement contre la tuberculose pouvait s’avérer fatale.
Une fois en Pologne, ses réserves de médicaments s’amenuisant, Maryna a informé les autorités sanitaires de son état, et a demandé que sa fille subisse un dépistage systématique de la tuberculose. C’est avec une très grande tristesse qu’elle a d’abord appris qu’elle et sa fille devraient être hospitalisées séparément.
« Mon mari est policier et ne peut pas quitter le pays, alors depuis que je suis en Pologne, je suis une mère célibataire, » a-t-elle expliqué. « Après tout ce que nous avons traversé, il était hors de question que nous soyons séparées l’une de l’autre. J’aurais interrompu le traitement plutôt que d’être loin de ma fille »
Soins aux réfugiés atteints de tuberculose
En pensant à des réfugiés comme Maryna, Médecins sans frontières (MSF) et le gouvernement polonais ont pris des mesures pour soigner plus efficacement les patients arrivants atteints de tuberculose. Les directives thérapeutiques ont été mises à jour conjointement avec l’OMS, ce qui a permis d’éviter les hospitalisations. L’OMS a collaboré avec le gouvernement polonais pour se procurer les médicaments antituberculeux qui n’étaient pas auparavant disponibles en Pologne, et a fait don de 100 traitements contre la tuberculose pharmacorésistante.
Maryna a participé au projet pilote, son spécialiste de la tuberculose en Ukraine ayant vérifié qu’elle avait pris régulièrement ses médicaments et qu’elle répondait aux critères d’un traitement ambulatoire. Grâce au soutien pratique de Katya, une coordinatrice de MSF, Maryna a été orientée vers un médecin polonais disposé à l’aider, et a ainsi obtenu les médicaments dont elle avait besoin. Elle a pu rester avec sa fille et a terminé avec succès son traitement en ambulatoire.
Maryna est maintenant guérie. Elle a trouvé du travail en Pologne et espère rejoindre son mari dès que la situation s’améliorera. Elle plaide en faveur d’un traitement à distance de la tuberculose et donne des conseils aux nouveaux patients.
« N’abandonnez pas, » dit-elle. « Il vaut toujours mieux être en bonne santé que d’être malade, d’autant plus que cette maladie peut être mortelle. J’ai suivi mon traitement parce que je savais que ma fille avait besoin de moi. Il n’y avait pas d’alternative. »