Une nouvelle vidéo diffusée récemment par l’OMS/Europe raconte la longue bataille qui a réuni des spécialistes de la santé publique, des militants de la société civile, des journalistes et des hommes politiques contre une puissante industrie mondiale qui fabrique un produit hautement addictif et nocif. Elle décrit comment la lutte contre le tabac s’est durcie en Géorgie et comment le pays continue de se frayer un chemin vers un avenir sans tabac.
Il n’y a pas si longtemps, un tiers des 3,7 millions de Géorgiens fumaient. La prévalence du tabagisme chez les hommes adultes était parmi les plus élevées de la Région européenne de l’OMS : 57 %. De plus en plus de femmes, aussi, avaient commencé à utiliser du tabac.
Cela avait des conséquences dévastatrices pour les individus, les familles et la société. Des milliers de fumeurs et de personnes exposées à la fumée du tabac souffraient de nombreuses maladies, notamment des maladies cardiovasculaires et pulmonaires et des cancers. Les maladies liées au tabac provoquaient chaque année la mort de 11 400 Géorgiens. En termes économiques, le pays perdait environ 2,4 % de son produit intérieur brut à cause de la consommation de tabac.
Une victoire juridique
Ces chiffres alarmants indiquaient clairement la nécessité d’une intervention forte et immédiate dans le domaine de la lutte antitabac. Après diverses campagnes antitabac et des années de travaux préparatoires par les partenaires nationaux et internationaux, le Parlement géorgien a adopté une nouvelle loi sur la lutte antitabac le 4 mai 2017.
Cette loi a introduit une série de mesures innovantes pour la lutte antitabac et considérablement renforcé l’application des dispositions de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac relatives aux environnements sans tabac, au conditionnement et à l’étiquetage, ainsi qu’à la publicité, à la promotion et au parrainage en faveur du tabac. Elle a également renforcé la réglementation appliquée aux cigarettes traditionnelles ainsi qu’aux cigarettes électroniques et aux produits du tabac chauffés.
La nouvelle législation géorgienne a été introduite progressivement ; les premières mesures sont entrées en vigueur le 1er mai 2018. Les résultats ne se sont pas fait attendre. « En effet, la législation a produit des effets. En 1 ou 2 ans, le nombre de consommateurs de tabac a diminué de 1 à 2 %. Il y a eu une réduction du nombre d’admissions en hôpital pour accidents vasculaires cérébraux aigus et crises cardiaques », explique le docteur Amiran Gamkrelidze, directeur général du Centre national de lutte contre les maladies et de santé publique.
Ces résultats confirment ce que l’on sait depuis longtemps : une législation sur le tabac est efficace, elle sauve des vies et améliore la santé de la population.
Les détracteurs de cette législation ont avancé que le public n’accepterait pas les interdictions de fumer. Ils ont affirmé que la loi aurait un effet négatif sur les entreprises, en particulier sur le secteur de l’hôtellerie, qu’elle entraînerait des milliers de pertes d’emplois et qu’elle encouragerait le développement d’un marché noir florissant pour les cigarettes. Mais il n’en a pas été ainsi. En fait, cette législation a bénéficié d’un important soutien de la part des Géorgiens : plus de 79 % de la population était favorable à une réglementation antitabac et plus de 90 % à l’interdiction de la publicité pour le tabac.
S’assurer un soutien : la réussite passe par une étroite collaboration et l’appui de personnalités politiques
L’histoire de la Géorgie montre clairement que la lutte antitabac a pris de l’ampleur lorsque différents acteurs nationaux et partenaires internationaux ont uni leurs efforts pour sensibiliser la population aux méfaits du tabagisme et aux tactiques de l’industrie du tabac.
Le parcours de la Géorgie montre certains aspects importants de l’élaboration des politiques, en particulier le rôle significatif joué par les médias et les organisations non gouvernementales, ainsi que par des hommes politiques charismatiques qui s’engagent en faveur de la santé publique et sont prêts à défendre cette cause, tout en plaçant la lutte antitabac en tête des priorités.
Selon le docteur Marijan Ivanusa, chef du bureau de pays de l’OMS en Géorgie de 2016 à 2019, « la principale leçon apprise pendant et après l’approbation de la loi en Géorgie est que c’est possible. C’est possible dans un pays à revenu intermédiaire disposant de ressources très limitées, malgré la très forte opposition de l’industrie du tabac. C’est possible, c’est réalisable et la population en bénéficie. »
Il est à espérer que l’histoire de la Géorgie incitera d’autres pays à intensifier leurs efforts pour enrayer l’épidémie causée par le tabagisme.