Aperçu de la situation
Description de la situation
Aperçu de la situation
Les flambées épidémiques d’infection à virus Nipah ont un caractère saisonnier au Bangladesh, les cas se produisant généralement chaque année entre décembre et mai. Depuis le signalement du premier cas en 2001, le nombre de cas annuels a varié de zéro à 67, bien qu’au cours des cinq dernières années, les cas signalés aient été comparativement moins nombreux, allant de zéro en 2016 à huit en 2019.
Cependant, depuis le 4 janvier 2023 et à la date du 13 février 2023, 11 cas (10 cas confirmés et un cas probable) dont huit décès (taux de létalité de 73 %) ont été notifiés dans deux divisions du Bangladesh.
Le Ministère bangladais de la santé et de la protection de la famille a mis en œuvre une riposte multisectorielle, comprenant le renforcement des activités de surveillance, de la prise en charge des cas, de la prévention et de la maîtrise des infections, et le lancement de campagnes de communication sur les risques.
L’OMS évalue le risque comme étant élevé au niveau national, modéré au niveau régional et faible au niveau mondial.
Description des cas
Depuis 2001, le Bangladesh signale des flambées saisonnières d’infection à virus Nipah entre décembre et mai, correspondant à la saison de récolte de la sève de palmier dattier qui a lieu dans le pays de novembre à mars. Les cas signalés allaient de zéro (en 2002, 2006 et 2016) à 67 (en 2004). Un nombre plus faible de cas signalés a été observé à partir de 2016 à la suite d’une vaste campagne de sensibilisation au danger de la consommation de sève de palmier dattier crue (Figure 1).
Cependant, entre le 4 janvier et le 13 février 2023, un total de 11 cas (dix confirmés et un probable) d’infection à virus Nipah, dont huit décès (taux de létalité de 73 %), ont été notifiés dans sept districts de deux divisions du Bangladesh. Il s’agit du nombre le plus élevé de cas depuis 2015, année où 15 cas (dont 11 décès) avaient été signalés.
Dix des 11 cas signalés ont été confirmés en laboratoire, tandis qu’un cas – pour lequel aucun échantillon n’a pu être prélevé avant le décès – est considéré comme un cas probable compte tenu du lien épidémiologique avec la flambée en cours. Un test d’amplification en chaîne par polymérase en temps réel (RT-PCR) a confirmé la présence du virus Nipah dans les prélèvements de gorge et un test d’immunoadsorption enzymatique (ELISA) a confirmé la présence d’anticorps. Des tests de confirmation ont été effectués à l’Institut d’épidémiologie, de lutte contre les maladies et de recherche (IEDCR) et dans les laboratoires du Centre international de recherche sur les maladies diarrhéiques du Bangladesh (ICDDR, B).
Six cas ont été signalés dans la division de Dhaka, dont quatre décès dans les districts de Narsingdi (un cas décédé), Rajbari (quatre cas dont trois décès) et Shariatpur (un cas).
La division de Rajshahi a signalé cinq cas, dont quatre décès, dans les districts de Naogaon (deux cas dont un décès), Natore (un cas décédé), Pabna (un cas décédé) et Rajshahi
(un cas décédé) (Figure 2).
Figure 1. Nombre de cas et de décès dus au virus Nipah signalés par année, 1er janvier 2001 – 13 février 2023, Bangladesh

Figure 2. Répartition des cas d’infection à virus Nipah et des sites de surveillance (2001 – 2023) [à gauche] et des cas d’infection à virus
Nipah en 2023 [à droite].
Sur les 11 cas signalés, quatre étaient des femmes et sept des hommes. L’âge des cas va de 3 à 70 ans, l’âge médian étant de 22 ans. Sur les 11 cas, dix avaient des antécédents de consommation de sève de palmier dattier tandis qu’un cas, un nourrisson de 15 jours, est considéré comme un cas secondaire.
La période d’incubation estimée de ces cas variait de 3 à 15 jours avec une médiane de 14 jours. Les 11 cas ont tous été hospitalisés après l’apparition des symptômes.
Au total, 310 personnes contacts ont été identifiées autour des 11 cas et sont surveillées pendant 3 semaines à compter de la dernière date d’exposition possible.
Épidémiologie de l’infection à virus Nipah
L’infection à virus Nipah est une maladie zoonotique émergente véhiculée par la chauve-souris, qui est l’hôte naturel du virus, et transmise à l’être humain par des animaux infectés ou des aliments contaminés. Le virus peut également être transmis directement d’une personne à l’autre par contact étroit avec une personne infectée. Les chauves-souris frugivores ou roussettes de l’espèce Pteropus sont les hôtes naturels du virus Nipah.
On pense que la période d’incubation varie de 4 à 14 jours. Cependant, une période d’incubation pouvant aller jusqu’à 45 jours a aussi été observée. Le diagnostic en laboratoire d’un patient ayant des antécédents cliniques d’infection par le virus Nipah peut être établi pendant les phases aiguë et de convalescence de la maladie en utilisant une combinaison de tests. Les principaux tests utilisés sont le test RT-PCR pratiqué sur les liquides corporels et le test ELISA pour la détection d’anticorps.
Le tableau clinique de l’infection par le virus Nipah chez l’être humain est vaste, allant de l’infection asymptomatique (subclinique) à l’infection respiratoire aiguë voire à l’encéphalite mortelle. Les personnes infectées développent initialement des symptômes tels que fièvre, maux de tête, myalgie (douleurs musculaires), vomissements et maux de gorge. Ceux-ci peuvent être suivis d’étourdissements, de somnolence, d’altération de la conscience et de signes neurologiques indicateurs d’une encéphalite aiguë. Certaines personnes peuvent également souffrir d’une pneumonie atypique et de problèmes respiratoires sévères, y compris d’insuffisance respiratoire aiguë. Dans les cas graves, on observe une encéphalite et des convulsions, qui évoluent vers le coma en 24 à 48 heures. La plupart des patients qui survivent à l’encéphalite aiguë guérissent complètement, mais des affections neurologiques à long terme ont été signalées chez les survivants. Environ 20 % des patients gardent des séquelles neurologiques comme des troubles convulsifs et des altérations de la personnalité. Dans un petit nombre de cas, les sujets guéris souffrent par la suite d’une rechute ou d’une encéphalite d’apparition tardive.
On estime que le taux de létalité se situe globalement entre 40 % et 75 % ; ce chiffre peut néanmoins varier en fonction des capacités locales de surveillance épidémiologique et de prise en charge clinique. Bien que des antiviraux soient en cours de développement, il n’existe aucun vaccin ou produit thérapeutique homologué disponible pour prévenir ou traiter l’infection à virus Nipah.
Épidémiologie de la maladie
Nipah virus infection is an emerging bat-borne zoonotic disease transmitted to humans through infected animals or contaminated food. It can also be transmitted directly from person to person through close contact with an infected person. Fruit bats or flying foxes (Pteropus species) are the natural hosts for Nipah virus.
The incubation period is believed to range from 4 to 14 days. However, an incubation period up to 45 days has been reported. Laboratory diagnosis of a patient with a clinical history of Nipah virus infection can be made during the acute and convalescent phases of the disease by using a combination of tests. The main tests used are RT-PCR from bodily fluids and antibody detection via ELISA.
Nipah virus infection in humans causes a range of clinical presentations, from asymptomatic infection (subclinical) to acute respiratory infection and fatal encephalitis. Infected people initially develop symptoms including fever, headaches, myalgia (muscle pain), vomiting, and sore throat. This can be followed by dizziness, drowsiness, altered consciousness, and neurological signs that indicate acute encephalitis. Some people can also experience atypical pneumonia and severe respiratory problems, including acute respiratory distress. Encephalitis and seizures occur in severe cases, progressing to coma within 24 to 48 hours. Most people who survive acute encephalitis make a full recovery, but long-term neurologic conditions have been reported in survivors. Approximately 20% of patients are left with residual neurological consequences such as seizure disorder and personality changes. A small number of people who recover subsequently relapse or develop delayed onset encephalitis.
The overall global case fatality rate is estimated at 40% to 75% depending on local capabilities for epidemiological surveillance and clinical management. Although antivirals are in development, there are no licensed vaccines or therapeutics available for the prevention or treatment of Nipah virus infection.
Action de santé publique
Les mesures de santé publique suivantes ont été mises en œuvre par le gouvernement du Bangladesh :
Coordination :
- L’unité de lutte contre les maladies transmissibles et la Direction générale des services de santé (CDC-DGHS) ont tenu une réunion d’urgence le 28 janvier 2023 avec l’ensemble des directeurs de division, des chirurgiens civils, des agents de santé et de planification familiale et d’autres experts en santé publique pour discuter et élaborer des stratégies de riposte à l’épidémie.
Surveillance :
- L’enquête sur la flambée, y compris la recherche des contacts, est actuellement menée par l’équipe nationale d’intervention rapide (NRRT) en collaboration avec l’ICDDR,B.
- Le CDC-DGHS, l’IEDCR, le Bureau de l’éducation sanitaire, l’ICDDR,B et l’OMS concentrent leurs efforts sur le renforcement du système de surveillance existant ; l’élaboration d’une stratégie d’intervention immédiate ; et le matériel d’information, d’éducation et de communication (IEC) pour les activités de plaidoyer et de sensibilisation.
Prise en charge des cas :
- Le CDC-DGHS et les principaux cliniciens du Dhaka Medical College Hospital renforcent la prise en charge des cas. Les lits de l’unité de soins intensifs de l’hôpital réservée aux patients atteints de la COVID-19 ont été réaffectés temporairement à la prise en charge des cas d’infection à virus Nipah.
- L’hôpital des maladies infectieuses (IDH) de Dhaka a été désigné pour prendre en charge la quarantaine et l’isolement des cas présumés d’infection à virus Nipah.
Lutte anti-infectieuse :
- Les agents de santé à tous les niveaux ont pour instruction d’appliquer les mesures optimales de prévention et de lutte contre les infections, notamment en portant des masques et des gants, en enquêtant sur les cas et en les prenant en charge localement, sans les transférer à Dhaka, sauf si nécessaire.
- Les lignes directrices nationales pour la prise en charge, la prévention et la maîtrise de l’infection à virus Nipah sont en cours de révision et de mise à jour, l’accent étant mis sur les mesures de sécurité pour les agents de santé et les mesures de lutte anti-infectieuse.
Communication sur les risques et mobilisation communautaire :
- Les activités de sensibilisation, de communication sur les risques et de mobilisation communautaire se poursuivent.
- Deux numéros d’assistance téléphonique ont été mis en place pour l’infection à virus Nipah, l’un à l’IEDCR et l’autre à l’ICDDR,B dans le but de recueillir
des signalements formels et informels sur les cas de Nipah et de répondre aux questions d’ordre général du public sur l’infection à virus Nipah et d’autres maladies infectieuses.
Évaluation du risque par l’OMS
L’OMS évalue le risque global pour cette flambée comme étant très élevé à l’échelle nationale, pour les raisons suivantes :
- Bien que des cas de virus Nipah soient signalés au Bangladesh presque chaque année, 11 cas et huit décès ont déjà été signalés en 2023, ce qui est inhabituel par rapport aux sept dernières années.
- Le taux de létalité de l’infection à virus Nipah est élevé (73 %). Les premiers signes et symptômes de l’infection à virus Nipah ne sont pas spécifiques et il est souvent difficile de la diagnostiquer sur la base des signes cliniques. Cela peut nuire à la précision du diagnostic, rendre difficile la détection des flambées, et retarder l’adoption de mesures efficaces et opportunes de lutte anti-infectieuse, et les activités de riposte.
- Il n’existe actuellement aucun médicament ou vaccin spécifique contre l’infection à virus Nipah, bien que l’OMS ait identifié la maladie à virus Nipah comme une maladie prioritaire dans le schéma directeur de l’OMS en matière de recherche-développement. Des soins de soutien intensifs sont recommandés chez les patients présentant des complications respiratoires et neurologiques sévères.
- À l’heure actuelle, le niveau de sensibilisation de la population générale est encore faible, malgré les efforts continus de communication sur les risques et de mobilisation communautaire.
- On a déjà observé un cas de transmission interhumaine présumée au cours de la flambée actuelle et des cas secondaires ont été signalés précédemment au Bangladesh.
- Les chauves-souris frugivores ou roussettes (de l’espèce Pteropus), réservoir naturel du virus Nipah, sont présentes au Bangladesh et la diversité génétique du virus Nipah isolé chez les personnes atteintes dans le pays suggère une diversité substantielle du virus dans le réservoir de la faune sauvage et une propagation répétée du virus de son réservoir à la population humaine.
Le risque au niveau régional est modéré car le district de Rajshahi est frontalier de l’Inde. Bien qu’il n’y ait pas eu de cas de transmission transfrontalière par l’être humain auparavant, ce risque demeure compte tenu du corridor écologique commun pour l’hôte naturel du virus (chauves-souris frugivores ou roussettes) et de sa présence antérieure chez les animaux domestiques et les humains dans les deux pays. L’Inde a également connu dans le passé des flambées d’infection à virus Nipah.
Le risque au niveau mondial est considéré comme faible compte tenu de l’absence d’hôtes naturels dans de nombreux pays et du fait qu’aucun cas n’a jamais été signalé en dehors du Bangladesh, de l’Inde, de la Malaisie et de Singapour.
Conseils de l’OMS
En l’absence de vaccin ou de traitement homologué disponible pour l’infection à virus Nipah, le seul moyen de réduire le nombre des infections chez l’être humain consiste à mener des campagnes de sensibilisation aux facteurs de risque et d’information sur les mesures à prendre pour réduire l’exposition au virus. La prise en charge des cas doit essentiellement reposer sur la prestation de soins de soutien aux patients. Des soins de soutien intensifs sont recommandés chez les patients présentant des complications respiratoires et neurologiques sévères.
Les messages de santé publique doivent être axés sur :
La réduction du risque de transmission de la chauve-souris à l’être humain : Les efforts visant à prévenir la transmission devraient d’abord se concentrer sur la réduction de l’accès des chauves-souris à la sève de palmier dattier et à d’autres produits alimentaires frais. Le jus de palmier dattier fraîchement récolté doit être bouilli et les fruits doivent être soigneusement lavés et pelés avant d’être consommés. Les fruits présentant des signes de morsures de chauves-souris doivent être jetés. Il convient d’éviter les zones où les chauves-souris ont l’habitude de se percher. Pour limiter les risques de transmission internationale liés à la consommation de fruits ou de produits dérivés (tels que le jus frais de palmier dattier) contaminés par de l’urine ou de la salive de chauves-souris infectées, il convient de laver et d’éplucher soigneusement les fruits avant de les consommer.
La réduction du risque de transmission de l’animal à l’être humain : L’infection naturelle chez les animaux domestiques a été décrite chez les porcs d’élevage, les chevaux, les chèvres, les moutons, mais aussi chez les chiens et les chats. Il faut porter des gants et des vêtements de protection pour manipuler des animaux malades ou leurs tissus, ainsi que pendant les opérations d’abattage. Dans la mesure du possible, les gens doivent éviter d’être en contact avec des porcs infectés. Dans les zones endémiques, lors de l’établissement de nouveaux élevages porcins, il convient de tenir compte de la présence de chauves-souris frugivores dans la zone et, en général, les aliments pour porcs et les porcheries devraient être protégés contre les chauves-souris lorsque cela est possible. Les échantillons prélevés sur les animaux présumés infectés par le virus Nipah doivent être manipulés par un personnel qualifié travaillant dans des laboratoires convenablement équipés. On peut prévenir l’infection à virus Nipah en évitant l’exposition aux chauves-souris et aux animaux malades dans les zones d’endémie et en s’abstenant de consommer des fruits partiellement mangés par des chauves-souris et de boire du vin de palme, de la sève ou du jus frais de palmier dattier.
La réduction du risque de transmission interhumaine :
Il faut éviter tout contact physique rapproché non protégé avec des
personnes infectées par le virus Nipah. Le lavage régulier des mains
doit être effectué après avoir soigné ou rendu visite à des personnes
malades. Les agents de santé soignant des patients atteints d’une
infection à virus Nipah présumée ou confirmée ou manipulant des
échantillons prélevés sur ces patients, doivent appliquer en permanence
les précautions standard de lutte contre l’infection. Étant donné que
des cas de transmission interhumaine ont été signalés parmi les
soignants, y compris les membres de la famille, et dans les
établissements de soins de santé, des précautions contre la transmission
par contact et gouttelettes doivent être prises en plus des précautions
standard. Des précautions contre la transmission par voie aérienne
peuvent être requises dans certaines circonstances.
Plus d'informations
- OMS. Principaux repères sur le virus Nipah
- OMS. Thèmes de santé. Infection à virus Nipah
- Institute of Epidemiology, Disease Control and Research. Nipah case update in 2023 (mis à jour le 6 février 2023)[DC1] .
- Luby SP, Rahman M, Hossain MJ, et al. Foodborne transmission of Nipah virus, Bangladesh. Emerg Infect Dis. 2006;12(12):1888-1894. doi:10.3201/eid1212.060732. Disponible à l’adresse : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3291367/.
- Organisation mondiale de la santé animale (OMSA). Virus Nipah.
Référence à citer : Organisation mondiale de la Santé (17 février 2023). Bulletin d’information sur les flambées épidémiques ; Infection à virus Nipah – Bangladesh. Disponible à l’adresse : https://covid.comesa.int/emergencies/disease-outbreak-news/item/2023-DON 442