Pour le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé, la flambée de maladie à virus Ebola en République démocratique du Congo (RDC) ne pourra prendre fin qu’à la condition qu’il y ait une coopération entre les deux principaux partis politiques et une appropriation communautaire. Il s’est adressé aux États Membres à Genève à son retour d’une visite en RDC, où il a passé en revue les interventions sanitaires et rencontré des dirigeants d’horizons divers pour dynamiser leur engagement. L’Organisation fait également face à un grave déficit de financement pour ses interventions.
« La coopération politique doit venir de tous les pays et de tous les partis », a déclaré le Dr Tedros. « Ce n’est qu’avec l’intervention des leaders des deux principaux partis politiques de la RDC que les communautés comprendront la menace que représente Ebola et s’approprieront la lutte contre cette épidémie. Pendant ce temps, d’autres pays se doivent d’appuyer les agents de santé de la RDC, de toute l’Afrique et du monde entier, qui œuvrent avec courage pour sauver des vies. »
Les besoins de financement de l’OMS pour la riposte se chiffrent à US $98 millions, sur lesquels seuls US $44 millions ont été reçus, soit un déficit de financement de US $54 millions. Il est impératif que ce déficit soit comblé immédiatement, sinon l’OMS ne sera pas en mesure de poursuivre son action dans les mêmes proportions qu’aujourd’hui. D’autres partenaires font également face à des problèmes de financement qui en ont conduit certains à réduire ou à arrêter leurs activités. La riposte risque d’être dictée par des décisions relevant davantage des capacités financières que des besoins opérationnels.
Lors de sa dernière visite en RDC, le Dr Tedros s’est entretenu à Kinshasa avec le Premier Ministre, Sylvester Ilunga Ilunkamba, et les leaders de l’opposition (Martin Fayulu et Mbusa Nyamwisi), mais aussi avec des chefs religieux et des partenaires. Il a ensuite rencontré à Butembo, l’un des points chauds de la flambée en cours, des leaders communautaires, des chefs religieux et des chefs d’entreprise, ainsi que des partenaires (des organisations non gouvernementales et d’autres agences des Nations Unies). Le Dr Tedros a déclaré: « J’ai rencontré de nombreux dirigeants de tous les pans de la société. Ils reconnaissent tous qu’ils ont un rôle à jouer pour sensibiliser la population à la gravité de cette maladie. Le virus se faufile entre les brèches lorsque l’on ne fait pas front commun ».
Il s’agissait de la neuvième mission du Dr Tedros dans ce pays. Sa dernière visite à Butembo remonte à la fin du mois d’avril, qui faisait suite à de multiples attaques perpétrées contre des agents de santé et des installations sanitaires. La mort de leur collègue, le Dr Richard Mouzoko, a terrorisé le personnel mais aussi encore renforcé sa volonté d’enrayer la flambée de maladie à virus Ebola.
« La dernière fois que je me suis rendu en RDC, c’était une période très difficile », a avoué le Dr Tedros. « Mais les centaines de personnes qui luttent pour mettre fin à cette flambée sont motivées par le fait que la population de la RDC a besoin de leur aide. Nous nous sommes donc réunis pour trouver des moyens de redynamiser et de renforcer la riposte. Je suis revenu cette fois-ci pour dresser le bilan des progrès accomplis et voir si les changements nécessaires ont été apportés et sont efficaces. »
Des besoins clairs avaient été identifiés à l’époque pour créer un environnement de travail plus sûr et pour renforcer la participation d’autres partenaires des Nations Unies et d’organisations non gouvernementales. Il fallait notamment mieux utiliser le vaccin contre la maladie à virus Ebola, qui est très efficace à condition qu’il soit administré à toutes les personnes ayant été en contact avec un cas confirmé. La vaccination est intensifiée et proposée à un plus grand nombre de personnes, y compris les femmes enceintes et allaitantes et les enfants de plus de six mois (au lieu de seulement ceux d’un an et plus). Ce nouveau protocole a été lancé par le Dr Tedros dimanche à Katwa, autre point chaud de la maladie à virus Ebola.
L’adaptation de la stratégie semble désormais porter ses fruits. On note une amélioration à Butembo et à Katwa, même si Mabalako est en train de devenir un nouveau point chaud.
Au cours de deux jours de réunions en Ouganda, le Dr Tedros a rencontré le Président ougandais, M. Yoweri Kaguta Museveni, la ministre de la Santé, la Dre Jane Ruth Aceng, les responsables de l’Uganda Virus Research Institute, la coordonnatrice résidente des Nations Unies, Mme Rosa Malango, l’Ambassadrice des États-Unis en Ouganda, Mme Deborah Malac, et bien d’autres personnes encore. Le pays est en situation de « réponse Ebola » depuis qu’il a confirmé la semaine dernière la contamination de trois personnes infectées en RDC. Ces trois cas sont malheureusement décédés depuis, mais aucun autre cas n’a été confirmé. Le Dr Tedros a fait observer que l’investissement du pays dans la préparation a permis de réagir rapidement.
« Après avoir observé la rapidité de la riposte en Ouganda, je ne peux qu’exhorter la communauté internationale à continuer à soutenir les activités de préparation en cours dans ce pays et dans les pays limitrophes », a déclaré le Dr Tedros. « Nous avons pu constater concrètement combien cet investissement sauve des vies en freinant la propagation d’un agent pathogène dangereux. »