Bulletins d'information sur les flambées épidémiques

Expansion géographique des cas de dengue et de chikungunya au-delà des zones historiques de transmission dans la Région des Amériques

23 mars 2023

Description de la situation

Aperçu de la situation

L’augmentation de l’incidence et de la répartition géographique des arboviroses, notamment le chikungunya et la dengue, constitue un problème de santé publique majeur dans la Région des Amériques (1). La dengue représente le plus grand nombre de cas dans la Région, des épidémies se produisant tous les trois à cinq ans. Bien que la dengue et le chikungunya soient endémiques dans la plupart des pays d’Amérique centrale, d’Amérique du Sud et des Caraïbes, au cours de la saison estivale actuelle, une augmentation de la transmission et une expansion des cas de chikungunya ont été observées au-delà des zones historiques de transmission. En outre, on observe une forte transmission de la dengue depuis le début de l’année 2023. De plus, des taux de transmission plus élevés sont attendus dans les mois à venir dans l’hémisphère Sud, en raison des conditions météorologiques favorables à la prolifération des moustiques.

Un total de 2,8 millions de cas de dengue ont été signalés dans les Amériques en 2022, ce qui représente plus du double des 1,2 million de cas signalés en 2021. La même tendance à la hausse a été observée pour le chikungunya, avec une incidence élevée de la méningo-encéphalite pouvant être associée au chikungunya signalée par le Paraguay, ce qui est également préoccupant.

Au niveau régional, l’OMS estime que le risque est élevé en raison de la présence généralisée de moustiques vecteurs, du risque continu de maladie sévère et même de décès, et de l’expansion en dehors des zones historiques de transmission, dans des zones où il est possible que toute la population, y compris les groupes à risque et les agents de santé, n’ait pas connaissance des manifestations cliniques de la maladie, notamment les manifestations cliniques sévères, et dans lesquelles les populations peuvent être immunologiquement naïves (2).

Aperçu régional

En 2022, un total de 3 123 752 cas (suspects et confirmés) d’arboviroses ont été signalés dans la Région des Amériques. Parmi ceux-ci, 2 809 818 (90 %) étaient des cas de dengue et 273 685 (9 %) étaient des cas de chikungunya. Cela représente une augmentation proportionnelle d’environ 119 % par rapport à 2021. En 2022, les cas de dengue tout comme ceux de chikungunya ont atteint un pic au cours de la semaine épidémiologique (SE) 18 (semaine commençant le 1er mai 2022) (3).

Dengue

Aperçu régional

En 2022, un total de 2 809 818 cas de dengue ont été enregistrés, dont 1 290 décès, ce qui représente deux fois plus de cas et près de trois fois plus de décès par rapport aux cas signalés en 2021 (1 269 004 cas, dont 437 décès). Au cours de la même période, l’incidence cumulée la plus élevée des cas de dengue a été signalée dans les pays suivants : Nicaragua avec 1 455,4 cas pour 100 000 habitants, suivi du Brésil avec 1104,5 cas pour 100 000 habitants et du Belize avec 788,9 cas pour 100 000 habitants (3).

Entre le 1er janvier 2023 et le 4 mars 2023, un total de 342 243 cas de dengue, dont 86 décès, ont été signalés dans la Région des Amériques. Au cours de la même période, l’incidence cumulée la plus élevée des cas de dengue a été signalée en Bolivie, avec 264,4 cas pour 100 000 habitants, suivie du Nicaragua avec 196,8 cas pour 100 000 habitants et du Belize avec 145,6 cas pour 100 000 habitants (3).

Figure 1. Répartition des cas suspects de dengue, par semaine épidémiologique, Région des Amériques, du 1er janvier 2020 au 4 mars 2023.

Aperçu par pays

Bolivie : Entre le 1er janvier et le 11 février 2023, un total de 31 283 cas, dont 50 décès, ont été notifiés en Bolivie. Parmi les cas notifiés, 47 % (n = 14 842) étaient des cas confirmés en laboratoire et 110 cas ont été classés comme cas de dengue sévère. Les cas confirmés ont été signalés dans sept des neuf départements. Parmi ces sept départements touchés, trois départements concentraient 90 % des cas signalés : Santa Cruz (72 % ; 10 759 cas, 36 décès), Beni (9,6 % ; 1 387 cas, 11 décès) et Tarija (9,3 % ; 1 431 cas, trois décès) (4). L’incidence cumulée était de 264,4 cas pour 100 000 habitants pour la dengue. À la SE 6, le taux de létalité au niveau national est de 0,083 %. Au cours de la même période, le virus de la dengue de type 2 (DENV-2) a été signalé comme étant le sérotype prédominant en circulation dans le pays (4). Le nombre de cas le plus élevé a été signalé en 2020, avec 111 347 cas. Parmi ces cas, 33 % (n = 37 293) ont été signalés entre la SE 1 et la SE 6. En 2023, 31 283 cas de dengue au total ont été signalés (4)

Paraguay : Entre le 1er janvier et le 4 mars 2023, 686 cas au total ont été notifiés. Le pays n’a signalé aucun cas de dengue sévère ni aucun décès au cours de cette période. Des cas confirmés ont été signalés dans tous les départements, dont trois concentraient 50 % des cas signalés : Central (22 % ; n = 149), Amambay (15 % ; n = 101) et Asunción (14 % ; n = 93). À la SE 8 de 2023, le DENV-1 et le DENV-2 étaient signalés comme étant en circulation dans le pays, le DENV-1 étant prédominant (5). La première flambée épidémique de dengue de grande ampleur a été signalée dans le pays en 2020, avec 223 782 cas. Parmi ces cas, 65 % (n = 146 375) ont été signalés entre la SE 1 et la SE 7 (5)

Pérou : Entre le 1er janvier et le 4 mars 2023, un total de 20 017 cas de dengue ont été notifiés, dont 25 décès. Parmi ces cas, 80 ont été classés comme cas de dengue sévères. Des cas confirmés ont été signalés dans 19 des 25 régions et dans 80 provinces. À la SE 10 de 2023, les sérotypes DENV-1, DENV-2 et DENV-3 avaient été détectés comme étant en circulation, le DENV-1 étant prédominant. L’incidence cumulée la plus élevée des cas de dengue au Pérou a été enregistrée en 2017, avec 68 290 cas signalés (6, 7).

Chikungunya

Aperçu régional

Entre le 1er janvier et le 4 mars 2023, un total de 113 447 cas de chikungunya ont été notifiés dans la Région des Amériques, dont 51 décès, soit quatre fois plus de cas et de décès par rapport à la même période en 2022 (21 887 cas, dont huit décès). Ces chiffres dépassaient également le nombre moyen de cas des cinq années précédentes pour la période allant de la SE 1 à la SE 10. Parmi les cas notifiés dans la Région, l’incidence cumulée la plus élevée des cas de chikungunya a été signalée au Paraguay avec 1 103,4 cas pour 100 000 habitants, suivi du Brésil avec 14,2 cas pour 100 000 habitants et du Belize avec 10,4 cas pour 100 000 habitants. Tous les décès signalés en 2023 ont été notifiés au Paraguay (3).

En 2022, le nombre de cas a dépassé la moyenne des quatre années précédentes (2018-2021), avec un total de 273 685 cas, dont 87 mortels, ce qui représente deux fois plus de cas et sept fois plus de décès par rapport aux cas notifiés en 2021 (137 025 cas, dont 12 décès). Tous les décès signalés en 2022 ont été notifiés au Brésil (3).

Figure 2. Cas de chikungunya par semaine épidémiologique (SE) de notification. Région des Amériques, du 1er janvier 2020 au 4 mars 2023 (jusqu’à la SE 9 de 2023).

Aperçu par pays

Argentine : Entre le 1er janvier 2023 et le 12 mars 2023, un total de 341 cas confirmés en laboratoire ont été notifiés, et aucun décès n’a été enregistré. Parmi ces cas, 60 % étaient des cas importés (personnes ayant contracté l’infection pendant un séjour ou un voyage en dehors du pays) (8). Cinq provinces signalent actuellement une transmission locale du chikungunya : la province de Buenos Aires, la cité autonome de Buenos Aires, Córdoba, Corrientes et Formosa. Ces provinces n’ont pas signalé de cas autochtones de chikungunya précédemment (8). Au cours de la même période en 2022, aucun cas autochtone de chikungunya n’a été signalé (8).

Bolivie : Entre le 1er janvier et le 11 mars 2023, 593 cas de chikungunya au total ont été signalés, ce qui représente 11 fois plus de cas par rapport à la même période en 2022. Au cours de cette période, aucun décès n’a été signalé et l’incidence cumulée nationale était de cinq cas pour 100 000 habitants (4).

Brésil : Entre le 1er janvier et le 11 mars 2023, 50 103 cas de chikungunya au total ont été signalés, ce qui représente une augmentation relative de 83 % par rapport à la même période en 2022. Six décès ont été confirmés dans les États de l’Espírito Santo et du Minas Gerais, et 23 décès font encore l’objet d’une enquête. Des cas ont été signalés dans les 27 unités fédérales (9). Au 11 mars 2023, l’incidence cumulée nationale était de 23,5 cas pour 100 000 habitants. L’incidence cumulée la plus élevée a été signalée dans la région du Sud du pays, avec 35 484 cas (39,5 cas pour 100 000 habitants) (9).

Paraguay : Entre le 2 octobre 2022 et le 4 mars 2023, un total de 40 984 cas ont été notifiés, dont 3 510 cas hospitalisés et 46 décès. Parmi ces cas, 0,3 % (n = 162) concernaient des nouveau-nés, dont huit décès. En outre, entre la SE 1 et la SE 9 de 2023, un total de 294 cas suspects de méningo-encéphalite aiguë ont été signalés, dont 42,5 % (n = 125) ont été attribués au chikungunya et 42 % (n = 53) concernaient des nouveau-nés (5). Des cas confirmés et probables ont été signalés dans tous les départements du pays. Le nombre de cas le plus élevé a été signalé dans deux départements : Central (24 556 cas, dont 32 décès) et Asunción (9 981 cas, dont 11 décès) (5).

Pérou : Entre le 1er janvier et le 11 mars 2023, 97 cas de chikungunya au total ont été signalés, ce qui représente plus de trois fois plus de cas par rapport à la même période en 2022. Des cas confirmés ont été notifiés dans quatre départements ; la proportion de cas la plus élevée a été signalée dans le département de Piura (69 % ; n = 67 cas), suivi de San Martín (29 % ; n = 28 cas) (6, 7).

Épidémiologie de la dengue et du chikungunya

Les arboviroses, telles que la dengue et le chikungunya, sont causées par des infections virales transmises à l’être humain par des piqûres de moustiques infectés. Ces maladies constituent des menaces pour la santé publique mondiale dans les zones tropicales et subtropicales où vivent environ 3,9 milliards de personnes (10).

Dengue

La dengue sévit dans les régions tropicales et subtropicales du monde entier, avec une prédilection pour les zones urbaines et semi-urbaines. Les principaux vecteurs de la maladie sont les moustiques de l’espèce Aedes aegypti et, dans une moindre mesure, de l’espèce Aedes albopictus.

La dengue est due au virus de la dengue (DENV), un virus à ARN de la famille des Flaviviridae. Il existe quatre sérotypes distincts mais étroitement apparentés de ce virus (DENV-1, DENV-2, DENV-3 et DENV-4). L’infection par un sérotype confère une immunité à long terme au sérotype homologue, mais pas aux autres sérotypes ; les infections successives exposent les personnes à un risque accru de dengue sévère, qui peut provoquer un choc ou une détresse respiratoire en raison de fuites plasmatiques, d’hémorragies profuses, d’insuffisances organiques, et peut entraîner le décès.

Il n’existe pas de traitement spécifique contre la dengue ; néanmoins, la détection rapide des cas, l’identification des signes d’alerte de dengue sévère et une prise en charge appropriée des cas sont des éléments clés des soins pour éviter les décès, et peuvent ramener les taux de létalité de la dengue sévère à moins de 1 %.

La Région des Amériques recueille des données épidémiologiques sur la dengue depuis 1980. Depuis lors, le virus s’est propagé dans la majeure partie de la Région. Le nombre de cas de dengue le plus élevé a été signalé en 2019, avec plus de 3,1 millions de cas, dont 28 203 cas sévères et 1 773 décès.

Chikungunya

Le chikungunya est une maladie virale transmise par les moustiques qui provoque une fièvre et des douleurs articulaires sévères. La maladie a été décrite pour la première fois en 1952 lors d’une flambée épidémique dans le Sud de la Tanzanie.

Le virus du chikungunya (CHIKV) est le plus souvent transmis par les moustiques femelles des espèces Aedes aegypti et Aedes albopictus, qui peuvent également transmettre d’autres virus transmis par les moustiques, notamment le virus de la dengue et le virus Zika. Ces moustiques piquent tout au long de la journée, bien qu’il puisse y avoir des pics d’activité tôt le matin et en fin d’après-midi.

Selon la durée des manifestations cliniques, le chikungunya peut être aigu, subaigu et chronique. Les symptômes sévères qui évoluent jusqu’au décès sont rares ; toutefois, les patients aux deux extrémités du spectre de l’âge courent un risque plus élevé de développer une forme grave de la maladie. La maladie se caractérise sur le plan clinique par une fièvre d’apparition soudaine, fréquemment accompagnée d’arthralgies sévères et handicapantes ou d’arthrite, dont la durée varie ; des complications neurologiques, telles que le syndrome de Guillain-Barré et la méningo-encéphalite, ont été signalées. La plupart des patients se rétablissent complètement, et l’infection peut entraîner une immunité à vie.

Le chikungunya néonatal a également été décrit. La plupart des infections par le CHIKV pendant la grossesse n’entraînent pas la transmission du virus au fœtus. Le risque de transmission le plus élevé semble être associé aux situations dans lesquelles les femmes sont infectées pendant la phase intrapartum, le taux de transmission verticale atteignant alors 49 % (11).

Les nourrissons sont généralement asymptomatiques à la naissance et développent ensuite une fièvre, une irritabilité, une éruption cutanée et un œdème périphérique. Les nourrissons infectés pendant la phase intrapartum peuvent également développer une maladie neurologique (par exemple, méningo-encéphalite, lésions de la substance blanche, œdème cérébral et hémorragie intracrânienne), des symptômes hémorragiques et une maladie myocardique. Les anomalies biologiques comprenaient une augmentation des résultats des tests de la fonction hépatique, une réduction des numérations plaquettaire et lymphocytaire et une diminution du taux de prothrombine. Les nouveau-nés qui sont atteints d’une maladie neurologique développent souvent des handicaps à long terme. Aucune donnée probante n’indique que le virus est transmis par le lait maternel.

Une transmission autochtone du virus du chikungunya a été confirmée pour la première fois dans la Région des Amériques en décembre 2013, suivie d’une propagation épidémique en 2014. Depuis lors, le virus s’est propagé dans l’ensemble de la Région.

Épidémiologie de la maladie

Arboviral diseases, such as dengue and chikungunya, are caused by viral infections transmitted to humans through bites of infected mosquitoes. These diseases are global public health threats in the tropical and sub-tropical areas where approximately 3.9 billion people live. (10)

Dengue

Dengue is found in tropical and sub-tropical climates worldwide, mostly in urban and semi-urban areas. The primary vectors that transmit the disease are Aedes aegypti mosquitoes and, to a lesser extent, Aedes albopictus.

Dengue is caused by the dengue virus (DENV), an RNA virus of the family Flaviviridae. There are four distinct but closely related serotypes of the virus (DENV-1, DENV-2, DENV-3 and DENV-4). Infection with one serotype provides long-term immunity to the homologous serotype but not to the other serotypes; sequential infections put people at greater risk for severe dengue, which can include shock or respiratory distress due to plasma leakage, severe bleeding, organ impairment, and death.

There is no specific treatment for dengue; however, timely detection of cases, identifying any warning signs of severe dengue infection, and appropriate case management, are key elements of care to prevent death and can lower fatality rates of severe infection to below 1%.

The Region of the Americas has been collecting epidemiological data on dengue since 1980.  Since that time, the virus has spread throughout most of the Region. The highest number of dengue cases were reported in 2019, with more than 3.1 million cases, including 28 203 severe cases and 1773 deaths.

Chikungunya

Chikungunya is a mosquito-borne viral disease that causes fever and severe joint pain. The disease was first recognized in 1952 during an outbreak in southern Tanzania.

Chikungunya virus (CHIKV) is most commonly transmitted by female mosquitoes of the species Aedes aegypti and Aedes albopictus, which can also transmit other mosquito-borne viruses, including dengue and Zika. They bite throughout daylight hours, although there may be peaks of activity in the early morning and late afternoon. 

According to the duration of the clinical manifestations, chikungunya may be acute, sub-acute and chronic. Severe symptoms progressing to death are rare; however, patients at extremes of the age spectrum are at higher risk for severe disease. The disease is clinically characterized by the sudden onset of fever, frequently accompanied by severe and debilitating arthralgia or arthritis, that varies in duration; neurological complications, such as Guillain-Barré syndrome and meningoencephalitis, have been reported. Most patients recover fully from the infection, and the infection can provide lifelong immunity.

Neonatal chikungunya has also been described. Most CHIKV infections during pregnancy will not result in the virus being transmitted to the fetus. The highest transmission risk appears to be when women are infected during the intrapartum period, where the vertical transmission rate is as high as 49% (11).

Infants are typically asymptomatic at birth and then develop fever, irritability, rash, and peripheral edema. Those infected during the intrapartum period may also develop neurologic disease (e.g., meningoencephalitis, white matter lesions, cerebral oedema, and intracranial hemorrhage), hemorrhagic symptoms, and myocardial disease. Laboratory abnormalities included raised liver function tests, reduced platelet and lymphocyte counts, and decreased prothrombin levels. Neonates who suffer from neurologic disease often develop long-term disabilities. There is no evidence that the virus is transmitted through breast milk.

Autochthonous transmission of chikungunya virus was first confirmed in the Region of the Americas in December 2013, followed by epidemic propagation in 2014. Since then, the virus has spread throughout the region.

Action de santé publique

L’OMS apporte son soutien aux États Membres de la Région des Amériques en matière de préparation et de riposte aux flambées épidémiques, notamment en ce qui concerne l’organisation des services de santé. Le soutien apporté comprend plusieurs volets :

Surveillance :

  • L’OMS travaille activement avec les États membres pour renforcer les capacités en matière de soins de santé et de surveillance dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie de gestion intégrée pour la prévention et la lutte contre les arboviroses (SGI-Arbovirus).
  • L’OMS soutient la mise en œuvre d’activités intégrées efficaces de surveillance et de lutte antivectorielles par les États membres en publiant régulièrement des lignes directrices et en fournissant du matériel de surveillance épidémiologique et une assistance technique aux autorités nationales.
  • Des espaces virtuels de coopération ont été créés dans le cadre d’un effort de surveillance collaborative associant l’OMS et les États Membres ; ceux-ci permettent la génération automatique de différentes analyses épidémiologiques, tableaux de bord et bulletins épidémiologiques, renforçant ainsi la surveillance épidémiologique de la dengue et du chikungunya, ainsi que du virus Zika.

Laboratoires :

  • L’OMS soutient l’augmentation des capacités des laboratoires, afin de permettre un diagnostic et une détection des cas rapides et précis dans l’ensemble de la Région.

Prise en charge clinique :

  • Un ensemble d’interventions a été préparé afin de permettre aux pays de renforcer la prise en charge clinique, notamment l’élaboration et la diffusion de lignes directrices sur la prise en charge des cas, la fourniture de supports de formation virtuels et la constitution de réseaux infranationaux de formateurs cliniques afin de dispenser une formation clinique au niveau local.
  • Des experts de l’OMS sont régulièrement déployés dans les pays qui connaissent des flambées épidémiques de grande envergure (le Paraguay et la Bolivie).

Plaidoyer et planification :

  • En 2020, l’OMS a entamé une collaboration avec l’Organisme andin de la santé – Accord Hipólito Unanue (ORAS-CONHU) afin de renforcer les capacités techniques nationales de prévention et de lutte contre les arboviroses en Bolivie, en Colombie, au Chili, en Équateur, au Pérou et au Venezuela. Cette collaboration s’inscrit dans le cadre de la SGI-Arbovirus, approuvée par l’OMS.
  • En 2022, l’OMS a lancé l’Initiative mondiale de lutte contre les arbovirus, un plan stratégique intégré visant à lutter contre les arbovirus émergents et réémergents présentant un potentiel épidémique et pandémique, axé sur la surveillance des risques, sur la prévention, la préparation, la détection et la riposte face aux pandémies, et sur la constitution d’une coalition de partenaires.

Communication sur les risques et mobilisation communautaire :

  • L’OMS fournit des conseils en matière d’évaluation des risques et de communication sur les risques.
  • Des supports de communication génériques ont été élaborés, afin d’être facilement adaptés aux campagnes nationales.
  • L’OMS encourage les familles et les communautés à prendre des mesures de réduction des sources pour éliminer les sites de reproduction des moustiques à l’intérieur et autour des habitations, et à avoir recours à des mesures de protection personnelle des membres de la famille pendant la journée.

Évaluation du risque par l’OMS

La dengue et le chikungunya peuvent avoir de graves répercussions en matière de santé publique. Les virus qui provoquent ces infections circulent dans la Région des Amériques depuis des décennies en raison de la présence généralisée de moustiques du genre Aedes (principalement de l’espèce Aedes aegypti). Ces arbovirus peuvent être transportés par des voyageurs infectés (cas importés), ce qui peut donner lieu à l’établissement de nouvelles zones de transmission locale en présence de vecteurs et d’une population sensible. S’agissant d’arbovirus, toutes les populations des zones dans lesquelles les moustiques vecteurs sont présents sont à risque, mais l’impact est le plus important chez les personnes les plus vulnérables, pour lesquelles les programmes de lutte contre les arboviroses ne disposent pas de ressources suffisantes pour la riposte aux épidémies.

Bien que la dengue et le chikungunya soient endémiques dans la plupart des pays tropicaux et subtropicaux des Amériques et des Caraïbes, une augmentation de la transmission et une expansion des cas de chikungunya ont été observées au-delà des zones historiques de transmission. En outre, on observe une forte transmission de la dengue depuis le début de l’année 2023.

L’impact de l’augmentation de la transmission dans la Région dépendra de plusieurs facteurs, notamment : les capacités des pays à mener une riposte de santé publique coordonnée et à assurer la prise en charge clinique ; le début précoce de la saison des arbovirus dans le Cône Sud ; des densités élevées de moustiques en raison de l’interruption des activités de lutte antivectorielle au cours de la pandémie de COVID-19 ; et une importante population sensible aux infections à arbovirus, en particulier dans les zones où ces virus sont en circulation depuis peu. Des priorités et des risques concurrents associés à différentes maladies peuvent nuire à la lutte contre les maladies et à une prise en charge clinique appropriée, en raison de plusieurs éléments : i) des erreurs de diagnostic, étant donné que les symptômes du chikungunya et de la dengue peuvent être non spécifiques et ressembler à ceux d’autres infections, notamment la maladie à virus Zika et la rougeole, ce qui peut entraîner une prise en charge inadéquate des cas ; ii) des établissements de santé débordés dans certaines zones qui font face à un nombre élevé de cas et à d’autres flambées épidémiques concomitantes ; iii) les effets de la pandémie de COVID-19 en ce qui concerne la diminution des ressources disponibles pour les programmes de lutte contre les arboviroses et la nécessité de renforcer les capacités et de former les agents de lutte antivectorielle et de santé, ainsi que les besoins en matière d’entretien et d’approvisionnement s’agissant des équipements et des insecticides destinés aux activités de lutte antivectorielle.

La proportion plus élevée de méningo-encéphalite aiguë attribuée au chikungunya qui apparaît au Paraguay est préoccupante. On ne sait pas encore ce qui provoque un taux plus élevé de maladie neurologique, ce qui est considéré comme un tableau clinique atypique. Le séquençage a identifié la lignée de l’Afrique de l’Est/Centrale/du Sud (ECSA), dont l’aire de répartition géographique s’étend dans la Région, à la suite de sa première identification au Brésil en 2014. L’introduction du virus du chikungunya dans de nouvelles zones dans lesquelles les populations sont immunologiquement naïves favoriserait la poursuite de la propagation.

Les moustiques du genre Aedes sont largement répandus dans la Région des Amériques, de sorte que la transmission transfrontalière de la dengue et du chikungunya est probable. Les pays limitrophes de zones où la transmission de ces maladies est très élevée peuvent être exposés à un risque plus important, par exemple les pays voisins de la Bolivie (dengue) et du Paraguay (chikungunya). En outre, la saison estivale dans l’hémisphère Sud, caractérisée par des températures élevées et des taux d’humidité élevés, a une incidence sur la dynamique des vecteurs et peut augmenter la probabilité de transmission des arbovirus.

Ainsi, le risque au niveau régional est jugé élevé, en raison de la présence généralisée des espèces de moustiques vecteurs (en particulier Aedes aegypti), du risque continu de maladie sévère et même de décès, et de l’expansion en dehors des zones historiques de transmission, dans des zones où il est possible que toute la population, y compris les groupes à risque et les agents de santé, n’ait pas connaissance des signes d’alerte, et que la population soit immunologiquement naïve. De plus, un pays de la Région (le Paraguay) connaît une augmentation sans précédent des cas de chikungunya, et un autre pays de la Région (la Bolivie) connaît une incidence élevée des cas de dengue.

Les États Membres de la Région font état d’autres difficultés, notamment les ruptures de stock de plusieurs fournitures essentielles pour la prévention et la lutte contre les maladies, le manque de réactifs et de consommables pour le diagnostic en laboratoire, et la nécessité de formation de perfectionnement des équipes sur le terrain et des agents de santé. En outre, des taux de transmission plus élevés sont attendus dans les mois à venir, en raison des conditions météorologiques favorables à la reproduction des vecteurs au cours du premier semestre de l’année dans l’hémisphère Sud.

Conseils de l’OMS

Les efforts de prévention doivent être fortement axés sur la surveillance et la lutte contre les moustiques du genre Aedes (le vecteur le plus compétent de la Région). Des mesures ciblées intégrées de surveillance et de lutte antivectorielles sont utiles pour réduire les taux de transmission. La détection précoce de l’évolution vers une forme grave de la maladie et l’accès à des soins médicaux appropriés sont des éléments essentiels pour réduire la gravité et la mortalité. Les communautés doivent continuer à appliquer des mesures de protection individuelle dans les lieux de travail, les écoles et les habitations pour prévenir les piqûres de moustiques (par exemple, en appliquant des répulsifs contre les moustiques, en dormant sous des moustiquaires imprégnées d’insecticide pendant les heures où les moustiques piquent et en portant des vêtements à manches longues et des pantalons). Le risque de transmission du DENV et du CHIKV est à son niveau maximal pendant la journée et en début de soirée.

Il n’existe pas de traitement antiviral spécifique contre le chikungunya et la dengue. La prise en charge clinique est axée sur les soins de soutien, y compris la réhydratation et l’administration d’antipyrétiques. Étant donné que les symptômes de ces arboviroses peuvent se recouper, le diagnostic épidémiologique clinique peut être difficile, et il existe une réactivité croisée sérologique entre le virus de la dengue et le virus Zika, empêchant un diagnostic précis, ce qui peut entraîner une prise en charge inadéquate des cas et compromettre l’efficacité de la surveillance épidémiologique. Le diagnostic moléculaire par RT-PCR est donc recommandé.

Il est très important que les États Membres des Amériques soient extrêmement vigilants et soient prêts à intensifier les mesures de prévention, de détection précoce, de diagnostic et de lutte contre les arbovirus, notamment par la formation et la mise en garde des agents de santé concernant la détection des cas et les complications potentielles de ces maladies, l’identification des groupes à risque de maladie sévère, la prise en charge clinique appropriée des cas pour prévenir les décès, ainsi que la coordination transfrontalière active et l’échange d’informations en raison de la possibilité de cas dans les pays voisins. Compte tenu de l’incidence des arboviroses au cours des trois dernières années, une augmentation du nombre de cas d’arboviroses est attendue au cours du premier semestre 2023 dans l’hémisphère Sud, et pourrait être suivie par une saison de transmission élevée dans les pays situés dans le Nord de l’Amérique du Sud, en Amérique centrale et dans les Caraïbes, en raison de la présence de populations sensibles et de l’augmentation des températures.

Sur la base des informations actuellement disponibles, l’OMS recommande de n’appliquer aucune restriction aux voyages ou aux échanges commerciaux concernant les pays des Amériques qui font face aux flambées épidémiques actuelles d’arboviroses.

Plus d'informations

  1. Espinal, M.A. et al. (2019) ‘Emerging and Reemerging Aedes-Transmitted Arbovirus Infections in the Region of the Americas: Implications for Health Policy’, American Journal of Public Health, 109(3), pp. 387–392 (en anglais)
  2. Risk evaluation on chikungunya – Implications for the Region of the Americas - PAHO/WHO | Pan American Health Organization (sans date) (en anglais, consulté le 22 mars 2023)
  3. PAHO/WHO Data - PLISA (en anglais, consulté le 23 mars 2023). Ces informations peuvent être modifiées au fil du temps en raison d’ajustements rétrospectifs.
  4. PAHO/WHO Data - National Dengue fever cases (en anglais, consulté le 22 mars 2023)
  5. Communication interne du point focal national pour le Règlement sanitaire international (RSI) du Paraguay
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Référence à citer : Organisation mondiale de la Santé (23 mars 2023). Bulletins d’information sur les flambées épidémiques. Expansion géographique des cas de dengue et de chikungunya au-delà des zones historiques de transmission dans la Région des Amériques. Disponible à l’adresse : https://covid.comesa.int/fr/emergencies/disease-outbreak-news/item/2023-DON448